| PUBLICATION: | Le Soleil |
| DATE: | 2005.09.13 |
| SECTION: | Actualités |
| PAGE: | A3 |
| BYLINE: | Morin, Annie |
| PHOTO: | Deschênes, Steve |
| ILLUSTRATION: | La présente ronde de négociations remet la question dunombre d'élèves par classe à l'agenda. |
Il faudrait réduire à moins de 20 le nombre d'élèves par classe pour que les résultats des petits s'améliorent. Et encore, cela ne pourrait faire oublier un enseignant couci-couça.
Le Québec a commencé à réduire ses ratios maîtres-élèves au terme du renouvellement de la dernière convention collective des enseignants, en 2000. Les groupes de maternelle ont été limités à 20 élèves. Même chose en première et deuxième années en milieu défavorisé. Cette diminution a permis le maintien de 2043 postes d'enseignants qui, autrement, auraient été abolis en raison de la baisse démographique. La présente ronde de négociations remet la question du nombre d'élèves par classe à l'agenda. Cette fois, les enseignants voudraient étendre à tous les milieux, défavorisés ou pas, le maximum de 20 écoliers en première et deuxième années et faire baisser les ratios en troisième année, où on peut compter jusqu'à 27 élèves. "C'est un méchant saut", fait remarquer Johanne Fortier, présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE).
Celle-ci évoque également une révision des ratios au début du secondaire parce que "c'est une étape charnière, un nouveau début, et ça pourrait aider les jeunes à repartir" du bon pied. Actuellement, les groupes plafonnent à 32 tout au long du secondaire.
Dans un monde idéal, combien d'élèves un enseignant devrait-il avoir sous sa responsabilité ? Les grandes études américaines concluent qu'à moins de 20 élèves par groupe, les enfants apprennent mieux, surtout en début de parcours scolaire et dans les milieux défavorisés. Les enseignants sont moins stressés, plus présents, et les élèves s'imprègnent plus facilement de la culture scolaire, un préalable à la réussite. Ces effets positifs n'ont cependant pas été prouvés à la fin du primaire et au secondaire.
Formation
Dans une étude publiée le mois dernier, l'organisme de recherche indépendant C.D. Howe concluait qu'il était inutile et coûteux de s'attaquer aux ratios maîtres-élèves en raison de leurs effets limités sur la performance scolaire. Sa suggestion : investir plutôt dans la formation des enseignants.
Clément Gauthier, professeur au département d'études sur l'enseignement et l'apprentissage à l'Université Laval, va dans le même sens. "Je vais utiliser un argument cru : si t'enseignes mal à 40 élèves, tu vas enseigner mal à 20."
Et il écorche au passage la réforme de l'éducation parce qu'elle transforme les enseignants en animateurs et en gestionnaires de projets, ce qu'ils ne sont pas nécessairement. "Ça prend une grande maîtrise de l'enseignement pour gérer une classe efficacement", peu importe sa taille, insiste M. Gauthier.
Johanne Fortier est bien au courant des études. Mais elle continue de penser qu'"entre 20 et 30 élèves, ça fait une grosse différence". De façon très concrète, "il faut se séparer en 30 au lieu de 20". Sans compter que cela fait plus de correction, plus de téléphones, plus de rencontres avec les parents, plus d'échanges avec les spécialistes.
Bérénice Rioux, enseignante de troisième année à l'École de la Nacelle, à Saint-Jean-Chrysostome, pense comme sa dirigeante syndicale. Cette année, il y a 27 écoliers dans sa classe, soit le maximum permis par sa convention collective. Sur papier, toutefois, Mme Rioux se retrouve en dépassement parce que deux de ses élèves éprouvent de grandes difficultés scolaires et comptent pour deux.
C'est là que le bât blesse. "Ce sont souvent des petits enfants bien gentils, mais ils ne comprennent pas tout de suite. Ça leur fait de la peine si on ne s'occupe pas d'eux", explique Mme Rioux, qui s'en fait aussi pour ses "enfants ordinaires avec des petits problèmes" et ses "enfants ordinaires sans problèmes qui ont juste besoin d'attention".
Les ratios dérangent davantage les enseignants depuis l'intégration des élèves en difficulté d'apprentissage et de comportement dans les classes régulières. "Trois élèves difficiles peuvent facilement valoir les 25 autres", convient Clément Gauthier. A choisir entre la réduction des groupes et davantage de services professionnels pour les jeunes en difficulté, il penche pour la seconde option.
AMorin@lesoleil.com
Nombre d'élèves par enseignant
Niveau / 2003-2004
Ailleurs qu'en milieu défavorisé / Milieu défavorisé
Préscolaire 4 ans / 15-18 / 15-18
Préscolaire 5 ans / 18-20 / 18-20
1re primaire / 20-22 / 18-20
2e primaire / 22-24 / 18-20
3e primaire / 25-27 / 25-27
4e 5e 6e primaire / 27-29 / 27-29
De 1re à 5 e secondaire / 30-32 / 30-32