PUBLICATION:    Le Droit       
DATE:   2006.02.02     
SECTION:        Actualités     
PAGE:   15     
SOURCE:         PC     
DATELINE:       Québec 
ILLUSTRATION:   Les enfants en garderie peuvent devenir plus anxieux etagressifs.      

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Les CPE du Québec rendraient les enfants plus agressifs

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Cité en exemple à travers le pays, le modèle québécois de services de garde est pourtant taillé en pièces dans une étude récente de l'Institut C.D. Howe.

Les enfants qui fréquentent nos Centres de la petite enfance (CPE) seraient donc plus anxieux et agressifs que les autres petits du reste du pays, selon trois chercheurs de l'institut qui ont rendu publiques leurs observations hier.

"Pour presque tous les critères, nous constatons que le recours accru à la garde d'enfants est associé à une diminution du bien-être de ces derniers par comparaison avec les autres enfants. Par exemple, les signalements de bagarres et autres comportements agressifs ont augmenté de manière importante", selon Michel Baker, Jonathan Gruber et Kevin Mulligan.

Le premier est titulaire de la chaire RBC de politiques publiques et économiques à l'Université de Toronto, alors que MM. Gruber et Mulligan enseignent respectivement au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et à l'Université de la Colombie-Britannique.

Créé en 1997, le modèle québécois de garderies à 5 $, puis à 7 $, est en train de faire tache d'huile. Convaincu de sa supériorité, le gouvernement de Paul Martin avait entrepris de l'étendre au reste du pays, une initiative qui risque cependant d'être remise en question par le gouvernement conservateur de Stephen Harper, qui prône une approche très différente, axée sur l'aide directe aux parents.

Les trois chercheurs qui ont analysé le modèle québécois émettent de sérieuses réserves, notamment quant aux répercussions du programme sur le bien-être des enfants.

"Faisons attention. Continuons à évaluer ce programme-là. Il a plusieurs effets négatifs", a fait valoir un porte-parole de l'institut, Yvan Guillemette, au cours d'un entretien téléphonique. Tant à cause de son coût élevé pour l'État - plus d'un milliard $ par an au Québec - qu'en raison de l'impact sur les enfants, les auteurs invitent donc les gouvernements des autres provinces à la prudence avant d'importer le modèle québécois.

"L'adoption du modèle québécois à l'échelle du pays coûterait nettement plus que les montants que les partis ont proposé de dépenser lors de la dernière campagne électorale. Une éventuelle dépense de cette ampleur demande que l'on en comprenne bien les avantages potentiels", disent-ils.

L'étude des chercheurs est basée sur l'enquête longitudinale nationale de Statistique Canada sur les enfants et les jeunes, publiée en 2005, et menée auprès de 33 000 enfants de zéro à quatre ans, entre 1994 et 2003, et vise à comparer divers indicateurs avant et après la création du programme en 1997.

Par exemple, ils rapportent que la proportion de petits Québécois de deux à quatre ans présentant des troubles d'anxiété a augmenté de 34 % durant la décennie observée, contre seulement 11,8 % dans le reste du pays.

En comparant les différentes cohortes, ils concluent par ailleurs que la proportion d'enfants jugés agressifs a augmenté de 24,2 % au Québec contre 1,4 % ailleurs au Canada.

Comme il s'agit d'un régime universel, les auteurs constatent par ailleurs que le programme québécois de services de garde à contribution réduite a favorisé les familles à revenu moyen ou élevé, celles à faible revenu étant déjà avantagées avant l'adoption du programme.